L’écriture cursive un atout majeur pour les apprentissages
Ecriture et apprentissage
Depuis quelques décennies, la place du numérique ne cesse d’augmenter. Il y a encore quelques années, certains pays comme les États-Unis, la Norvège ou la Finlande se demandaient s’il était encore pertinent d’apprendre à écrire à la main et remettaient en cause l’apprentissage de l’écriture manuscrite et cursive. Ils recommandaient l’apprentissage de l’écriture avec le clavier. Cette recommandation a déclenché de vives réactions et des chercheurs en sciences cognitives ont mis en avant de nombreuses recherches. Ces pays ont fait progressivement machine arrière.
Réintroduction de l'écriture cursive dans les programmes
Ainsi depuis 2019, l’apprentissage de l’écriture manuscrite est remis au programme aux États-Unis.[1] Mais qu’en est-il de l’écriture cursive ? Quelle est l’importance de l’écriture dans les apprentissages ? Peut-on différencier les bénéfices de l’écriture cursive et de l’écriture script ?
L’écriture manuscrite est une représentation mentale, un acte moteur et langagier qui utilise nos sens : le toucher, la vue et l’ouïe. Cette activité est complexe car elle n’est pas innée et son apprentissage est long, jusqu’à 13 – 14 ans.
Un meilleur apprentissage de la lecture
Les recherches en neurosciences ont montré que l’apprentissage de l’écriture cursive permet un meilleur apprentissage de la lecture. En effet, en traçant les lettres en cursive, les élèves mémorisent mieux leur forme et comprennent mieux l’ordre des lettres de la gauche vers la droite. Le fait de lier les lettres entre elles, favorise la distinction des mots et la gestion des espaces entre ces mêmes mots. Mais elle permet aussi d’éviter des confusions de lettres : b et d, q et p. L’écriture cursive permet de mieux distinguer b et d comme q et p.
À contrario, dans les systèmes anglo-saxons, les enfants qui apprennent à écrire en script doivent apprendre à laisser un petit espace entre les lettres mais aussi un plus grand pour espacer les mots. Mais cela est difficile pour un jeune enfant. La confusion entre les lettres symétriques est aussi plus courante.
Développe les capacités sensori-motrices et celles de l’apprentissage
L’Université Norvégienne des Sciences et de la Technologie (NTNU) a publié les résultats de ses recherches dans « Frontiers in Psychology [2]». Des chercheurs ont mesuré l’activité du cerveau des enfants de 12 ans qui écrivent à l’aide d’un clavier et celle d’enfants du même âge qui écrivent à la main. L’écriture cursive est un outil important pour le développement cognitif. En effet, la graphomotricité active et développe différentes parties du cerveau et crée des connexions entre ces différentes zones. Ainsi, le cerveau développe « une spécialisation fonctionnelle » qui intègre à la fois la sensation, le contrôle du mouvement et la pensée. En outre, écrire à la main stimule les mêmes parties du cerveau que celles que l’on utilise pour lire. Les chercheurs ont également constaté que l’utilisation du clavier stimule d’autres zones du cerveau n’ayant aucun lien avec celles de l’apprentissage.
Développe la mémoire visuelle
L’écriture cursive permet ainsi de développer un lexique mais aussi une mémoire du geste : la mémoire kinesthésique et donc une meilleure mémorisation de l’orthographe. Le cerveau va mémoriser l’écriture d’un stock de mots, que nous serons capables, après plusieurs utilisations, d’écrire sans réfléchir.
L’oralisation et la mémoire visuelle lorsque l’on écrit, permettent également de mieux se rappeler l’orthographe des mots. Cela permet de mieux ancrer les apprentissages c’est la “conscientisation de l’écriture”. Qui n’a jamais eu besoin d’écrire un mot pour retrouver son orthographe ? C’est bien parce que l’on a appris à écrire, que notre cerveau se souvient du geste, qu’instinctivement on est capable d’écrire un mot sans avoir besoin de réfléchir à son orthographe.
Sollicite la mémoire à long terme
D’autres recherches [3] ont permis de constater que la prise de notes avec l’ordinateur a un avantage immédiat : un meilleur rappel que les notes manuscrites bien organisées. Mais cet avantage disparaît 24 h après. Les personnes qui ont écrit leurs notes à la main ont eu de meilleurs résultats que ceux qui ont tapé leurs cours à l’ordinateur. Ces derniers ont un moins bon souvenir car ils ne résument pas et ne synthétisent pas activement les notions clés en utilisant un clavier. Prendre des notes manuscrites implique vraisemblablement un traitement plus profond et plus approfondi des informations alors que la transcription ne nécessite qu’un encodage superficiel des informations.
Améliore les qualités rédactionnelles
Enfin, l’apprentissage de l’écriture manuscrite est également un bon moyen de développer des qualités rédactionnelles. Rares sont les personnes capables d’écrire de bout en blanc un long texte, un mémoire ou un livre au clavier. Le travail rédactionnel a besoin de passer par l’écriture manuscrite, pour ordonner ne serait-ce que les idées, le fil conducteur ou un plan. L’apprentissage du clavier comme celle de l’écriture manuscrite est longue et les jeunes ne maitrisent pas ces deux qualités en même temps. En 2009, Virginia Berminger a rapporté son étude sur les enfants de CE1, CM1 et 6ème qui écrivaient à la main plutôt qu’au clavier. Elle a constaté qu’ils écrivaient plus de mots, plus rapidement et que les textes étaient plus riches.
En conclusion, le clavier est un outil fantastique, qui peut aider à bien des égards. Mais il est important, comme nous l’avons vu de ne pas sauter les étapes. Sauf cas particulier, l’apprentissage du clavier ne doit pas se faire au détriment de celui de l’écriture manuscrite qui favorise un meilleur développement cognitif, sensori-moteur et langagier. Une fois l’écriture manuscrite automatisée, les ressources cognitives sont libérées et l’usage d’un clavier peut trouver tout son sens sans en abuser ! Car comme je le dis souvent, l’écriture manuscrite est un sport, c’est en le pratiquant régulièrement que l’on reste performant !
Références :
[2] Eva Ose Askvik, FR (Ruud) van der Weel et Audrey LH van der Meer. «The Importance of Cursive Handwriting Over Typewriting for Learning in the Classroom: A High-Density EEG Study of 12-Year-Old Children and Young Adults » Frontiers in Psychology (première publication : 28 juillet 2020) https://doi.org/10.3389/fpsyg.2020.01810
[3] Bui, D. C., Myerson, J., & Hale, S. (2013). Note-taking with computers: Exploring alternative strategies for improved recall. Journal of Educational Psychology, 105(2), 299–309. https://doi.org/10.1037/a0030367
Pour aller plus loin :
Dehaene, S. (2019). L’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Education France
Pierson, L. (2020). Bien écrire et aimer écrire. Edition MDI
Sana, F., Weston, T., Cepeda, N. J. (2012). Laptop multitasking hinders classroom learning for both users and nerby peers. Elsevier.
James, K.H.J, Engelhardt, L. (2012). The effects of handwriting experience on functional brain development in pre-literate children. Elsevier
Votre enfant commence à écrire? Vous trouverez ici quelques conseils pour bien apprendre à écrire.
Christine Groot pour Houston Accueil, octobre 2021.
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Une rééducation de l’écriture peut se faire à n’importe quel âge. N’attendez plus pour soigner votre écriture!